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Nommé dans le groupe d’experts de l’Onu sur le Pib: Léonard Wantchekon pour repenser les indicateurs de développement

Economie
Léonard Wantchekon pour partager son expertise dans le groupe d’experts de haut niveau de l’Onu sur les indicateurs "au-delà du Pib” Léonard Wantchekon pour partager son expertise dans le groupe d’experts de haut niveau de l’Onu sur les indicateurs "au-delà du Pib”

Le Béninois Léonard Wantchekon, professeur à Princeton et fondateur de l’African School of Economics, vient d’être nommé par le secrétaire général de l’Onu au sein d’un groupe d’experts de haut niveau chargé de formuler de nouveaux indicateurs allant « au-delà du Pib ». Une mission stratégique pour l’avenir des politiques de développement durable.

 

Par   Babylas ATINKPAHOUN, le 20 mai 2025 à 08h04 Durée 3 min.
#Onu

Le Produit intérieur brut (Pib) ne suffit plus à mesurer à lui seul le véritable progrès d’une société, ni à refléter le bien-être des populations, la durabilité environnementale ou la qualité des institutions démocratiques. C’est le constat unanime qui a motivé la création d’un groupe d’experts indépendants par le secrétaire général des Nations Unies. Dans ce cercle restreint de technocrates, figure désormais le nom de Léonard Wantchekon, économiste béninois de renommée mondiale, professeur à l’Université de Princeton et fondateur de l’African School of Economics (Ase).

La nomination de Léonard Wantchekon est une fierté pour le Bénin et pour l’Afrique toute entière. Annoncée récemment à New York, sa nomination marque une nouvelle étape dans son parcours intellectuel et militant, au service d’un développement plus juste, plus humain et plus durable.

Intitulé « Au-delà du Pib », ce groupe international composé de quatorze personnalités, toutes issues du monde académique ou de la recherche appliquée, a pour mandat de proposer un nouveau cadre d’analyse et un tableau de bord d’indicateurs alternatifs. L’objectif est de sortir d’une dépendance exclusive au Produit intérieur brut comme boussole du progrès.

Le groupe sera coprésidé par Kaushik Basu, ancien économiste en chef de la Banque mondiale, et Nora Lustig, spécialiste des inégalités en Amérique latine. Le mandat de ce groupe s’inscrit dans le sillage du « Pacte pour l’avenir », adopté par les États membres de l’Onu, qui appelle à une transformation profonde des outils de gouvernance mondiale. Il s’agit de mieux prendre en compte la complexité des sociétés modernes, marquées par la crise climatique, les inégalités structurelles, la perte de biodiversité et les limites de la croissance matérielle.

 

Au cœur du changement

Avec Léonard Wantchekon, c’est une voix africaine forte et singulière qui fait son entrée dans ce cénacle. Diplômé d’économie politique, il s’est illustré par des travaux pionniers sur les liens entre institutions, histoire coloniale et trajectoires de développement. À Princeton où il enseigne la science politique et les affaires internationales, il dirige également plusieurs projets de recherche sur la gouvernance démocratique, l’éducation et la pauvreté. Mais son engagement va bien au-delà des amphithéâtres universitaires. En fondant l’African School of Economics, dont le siège se trouve à Abomey-Calavi au Bénin, Léonard Wantchekon a voulu doter le continent africain d’une institution de recherche de haut niveau capable de former une nouvelle génération d’économistes enracinés dans les réalités locales mais ouverts aux standards mondiaux.

Léonard Wantchekon a été aussi un militant politique actif. Opposant au régime marxiste-léniniste du Bénin dans les années 1980, il fut emprisonné pour ses idées, avant de s’exiler et de reprendre des études aux Etats-Unis. Ce parcours atypique nourrit chez lui une sensibilité particulière pour les enjeux de démocratie, de mémoire et de justice sociale, qu’il place au cœur de sa réflexion économique. Lauréat du prestigieux Prix d’économie mondiale 2023 de l’Institut de Kiel, membre de la Société d’économétrie et de l’Académie américaine des arts et des sciences, il rejoint ce groupe onusien à un moment où les fractures sociales et les limites environnementales imposent de repenser les fondements de nos modèles de développement.

Les travaux du groupe « Au-delà du Pib » seront menés en étroite collaboration avec les États membres et divers partenaires, sous la coordination du Département des affaires économiques et sociales (Daes), du Pnud, de la Cnuced et du Cabinet du secrétaire général (Eosg). Le rapport final est attendu pour la 80e session de l’Assemblée générale des Nations Unies.

À travers cette mission, Léonard Wantchekon aura l’opportunité de porter les aspirations de millions de citoyens du Sud global vers une économie plus inclusive, fondée sur des indicateurs capables de rendre compte du bien-être, de la dignité, de l’éducation, de la santé et de la durabilité des dimensions essentielles mais longtemps négligées par le dogme du Pib.